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[Personnages] Helios et Tavraca

silivren7
silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
Cette discussion concernera tous les personnages rattachés aux deux familles que j'ai créé : les Helios de Myth Drannor et les Tavraca du Cormyr.

Concernant les fiches RP d'Illidrin Helios et Cyrien (Tavraca) dit Loup-Noir : voir la discussion [PERSONNAGE]: PRÉSENTATION DE VOTRE PERSONNAGE ouverte par @setill.

Concernant les fiches RP d'Esnaëlle Phoebus Helios et Te'arha Tavrara, elles sont en cours de mise au point.

Réponses

  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Départ de Myth Drannor

    Le jeune elfe de soleil se trouvait dans la bibliothèque de la demeure principale, le nez plongé dans un énorme livre écrit en une vieille langue elfique. Il est entouré de plusieurs piles de volumes épais, parsemées de parchemins à moitié déroulés, qui le cachaient presque sous leur hauteur. Il semblait extrêmement concentré dans sa lecture.

    - Illidrin !

    Le jeune elfe sursauta violemment et lâcha son livre qui s’écrasa sur ses pieds, lui arrachant une plainte étouffée. Trop brusquement sorti de sa lecture, il peinait à comprendre ce qui lui arrivait. Pour que son père hurle comme cela après lui, c’est qu’il l’avait encore fait sortir de ses gonds. Bien qu’il n’ait pas la moindre idée de sa faute. Aurait-il oublié un événement d’importance ?

    - Mon coeur souffre de ne pas être dans tes songes-du-jour, dit soudain une voix amusée. Il bondit et les tours bancales tanguèrent dangereusement, manquant de l’ensevelir. Le demi-elfe, apparu de nulle part, se tenait accroupi à la fenêtre, l’œil goguenard. Malgré sa surprise, et une certaine gêne de s’être laissé surprendre aussi facilement, Illidrin était heureux de le voir ; sentiment qui pouvait aisément se lire sur son visage.

    - Cyrien ! Quelle joie de te revoir. Cela fait si longtemps. Je n’avais pas encore été consacré la dernière fois que tu es venu à Myth Drannor.

    Loup-Noir sourit, amusé par l’enthousiasme du jeune elfe. Il sauta de la fenêtre pour lui donner une accolade maladroite ; depuis sa dernière visite, l’enfant devenu presque un adulte l’avait dépassé d’une demi-tête.

    - Je vois que tu as choisi ta Voie, Louveteau.

    - Oui-da, je serai paladin et à Amaunator, j’adresserai mon vœu. Pour celui-ci, j’hésite encore fortement.

    La porte de la bibliothèque claqua soudainement et un elfe altier entra d’un pas courroucé. Si Cyrien resta de marbre, Illidrin se tassa devant l’aura coléreuse de son père et lui adressa un sourire contrit. Mais Elandael se calma en avisant Cyrien dans la pièce.

    - Au moins ne souffres-tu pas de l’inattention de mon fils, Loup-Noir.

    Le visage couturé du général se détendit en un sourire sincère.

    - Heureux de te revoir, mon vieil ami.

    - De même, mon Frère-Loup.

    Les deux hommes se serrèrent l’avant-bras avant d’enclencher une embrassade en riant de leur propre idiotie à mettre autant de distance dans leurs rapports, d'autant plus que le Loup-Noir était des plus tactiles.

    - Des nouvelles du Cormyr ? Tu y es passé avant de faire route vers Myth Drannor, n’est-ce pas ?

    - Oui, retrouver l'odeur de ma Mère-Louve surtout, mais je me suis attardé dans la puanteur-de-la-ville. Je n’aime pas y retourner. Les Dragons Pourpres font toujours trop de fête au Chien de Guerre.Je n’ai rien de bien croustillant sous la dent, les affaires de Cour m’ennuient.

    - Je me contenterai de cela.

    - Un tel silence ne peut signifier que de bonnes nouvelles ! Un malheur aurait fait parler de lui.

    Son exclamation sembla exaspérer son père et il tourna le regard vers le sol, à nouveau contrit. Il est loin d’être l’elfe posé et sage que son père attendait de lui.

    - Vois mon fils, Cyrien : un enfant enthousiasme et naïf. Il ferait la paix avec un drow ou un demi-orc si ce dernier lui fait bonne figure. Je crains pour sa vie, Loup-Noir. Il ne fera pas long feu sur le champ de batailles. Alors prends-le avec toi.

    - Ma vie est loin d’être calme, Frère-Loup, car je chemine sur la Voie du Loup, tout en étant pour les Deux-Pattes aventurier et mercenaire. C'est un chemin-de-chasse tout autant dangereux que le chemin-de-guerre.

    - Si fait. Mais la route le forgera, là où il me paraît échouer. Mène-le à Padhiver. J’ai ouï-dire que la cité cherchait des aventuriers pour la protéger des dangers de la Côte des Epées. Et que tu y étais connu.

    - J'y ai une tanière-en-la-ville. Mon chemin-de-chasse me mène justement vers Padhiver. Si tel est votre souhait à tous les deux, je prendrai le Louveteau avec moi.

    - Je t’en remercie, mon vieil ami.

    Illidrin ne put s’empêcher de les interrompre à nouveau par une question enthousiaste.

    - Est-il vrai qu’il y a des émissaires de la Nouvelle-Sharandar à Padhiver et que nous pouvons les aider à combattre les fées noires de Malabog ?

    Son père soupira.

    - Si tu te crois prêt à aider les Ilyanbruens, tu es devenu téméraire. Ou encore plus naïf qu’avant. Prépare tes affaires, fils. Loup-Noir doit partir demain à l’aube. Ne le fais pas attendre.

    Elandael quitta la bibliothèque à grands pas. Cyrien adressa un sourire rassurant au jeune elfe dépité.

    - Viendra une Lune-Claire où le Louveteau sera un Loup.

    e lendemain, ils étaient sur le départ. Les chevaux piaffaient et s’agitaient. La monture de Cyrien, Drake, était une bête trapue et sauvage, à la robe marbrée et au regard fourbe. Illidrin partait avec une placide jument palomino, sa vieille amie Aube. Son père lui avait promis qu'il pourrait emmener Noirefutaie et Etoileneige s'il faisait ses preuves à Padhiver, en attendant, il peaufinerait le dressage des deux chevaux de guerre.

    C’était l’heure des adieux. Cyrien attendait près des bêtes, agenouillé auprès de sa Meute à leur parler par grognements et grondements. Resplendissante dans la lumière du matin, Illira tenait son fils dans ses bras, semblant ne pas vouloir le lâcher.

    - Prends garde à toi, mon garçon. Jusqu’à ce que ce soit aux créatures mauvaises de prendre garde à toi.

    Le ton amusé de sa mère lui soutira un sourire. Son père ne disait rien, inhabituellement silencieux, mais Illidrin notait quelque inquiétude dans son regard ; il ne se souvenait que trop du départ inattendu et douloureux d'Esna. Pourtant il ne l'envoyait faire ce voyage qu'après l'avoir testé en duel et approuvé sa technique. Il leur sourit pour les rassurer, embrassa sa mère et salua son père. Cyrien s’était relevé et revenait vers eux.

    - Frère-Loup, Sœur-Louve, que vos cœurs soient sereins sous la Lune, je prendrai soin du Louveteau comme s'il était Mien.

    - Nous le savons, Cyrien, lui répondit Illira d'une voix douce, Elandael hochant de la tête à sa suite. Une dernier embrassade et il se détourait pour enfourcher le cheval marbré qui se mit aussitôt à sautiller sur ses antérieurs, les naseaux frissonnants de l’envie du galop. Mais malgré son inimitée avec les équidés, Cyrien le tenait bien ; il se tourna vers Illidrin.

    - Dans la tanière-de-Frère-Loup, je suis Cyrien, Louveteau, mais sur les chemins-du-dehors, je suis Loup-Noir. Ne l'oublis pas.

    - J'essaierai, Cy… euh.. Loup-Noir.

    Cyrien soupira, devinant qu'il n'y arriverait certainement pas longtemps. Le sourire d'Illidrin se fait contrit. Mais il ne tarda pas à devenir lumineux alors qu'ils trottaient hors du domaine Helios. Il allait quitter Myth Drannor pour la première fois et aller à la rencontre du monde. Si espoirs et inquiétudes se mêlaient dans sa tête, le jeune elfe était au moins certain qu'il attendait ce moment depuis déjà un bout de temps.
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Cyrien - L'oeil de la sagesse

    Les hurlements des chiens transperçaient les cimes en un lugubre chant de guerre. Tous les autres bruits de la forêt s'étaient tus, comme si elle était à l'écoute de cette chasse sauvage où brûlait le désir de plonger les crocs dans la chair sans défense et de repeindre leur blancheur par le carmin du sang.

    Un son guttural sortit de la gorge du Chien de Guerre et sa meute se figea en arc de cercle autour de lui, grondant sauvagement d'un commun battement de cœur. Les guerriers aux pas feutrés qui suivaient les bêtes s'arrêtèrent à leur tour, la corde de leur arc tendue, figés dans l'attente du moindre ordre.

    Un mouvement entre les buissons déclencha le hurlement des plus jeunes chiens qui furent rapidement ramenés au silence par un son rauque du Chien de Guerre. Aran vint se poster à ses côtés, les babines retroussées et le poil hérissé, ses puissants muscles tendus vers l'endroit d'où il venait.

    Un sourire cruel étira la bouche du Chien de Guerre alors que les premières clameurs ennemies se faisaient entendre. Aran avait parfaitement effectué son rôle de rabatteur. Derrière la meute, les guerriers silencieux s'étaient engouffrés dans les futaies, ombres parmi les branches.

    Mais le Chien de Guerre restait immobile au milieu de la clairière, humant l'air avec un sourire carnassier, les yeux brillants de l'attente de la mise à mort. Aran poussa soudain un hurlement d'outre-tombe qui fut repris en écho de jappements par la meute.

    - Tuez-les jusqu'au dernier, ordonna le Chien de Guerre. Au même moment, le premier orc déboula d'entre les buissons, un cri de guerre à la gorge, son gourdin levé prêt à frapper le téméraire qui se dressait devant lui. Ses clameurs finirent dans des gargouillis alors qu'une flèche se plantait dans sa jugulaire et une autre dans sa clavicule. Il s'effondra au son de la colère de ses comparses et de l'aboiement d'attaque du Chien de Guerre.

    Les chiens sautèrent sans pitié à la gorge des orcs, esquivant habilement leurs coups, zigzagant entre les lances, ignorant les flèches quand bien même les touchaient-elles parfois. Pas un couinement, pas un gémissement ne venaient rompre leurs grondements et les flèches des guerriers embusqués finissaient de rendre la bataille confuse pour l'ennemi.

    Au milieu du désordre, le Chien de Guerre dansait sa symphonie morbide. Il jaillissait d'ombre en ombre, ses lames tailladant les cous et perforant les yeux, leurs gardes éclatant ici et là quelques crânes. Aran était dans son sillage, mordant les mollets et déchiquetant les jambes, en une ombre grise insaisissable.

    Les orcs n'avaient jamais eu la moindre chance et ils le comprirent bien trop tard pour s'enfuir. Les quelques fous à s'y risquer sous les pluies de flèches furent impitoyablement pourchassés par les chiens enragés de sang.

    Le Chien de Guerre secouant d'un mouvement sec ses dagues pour en ôter le sang et les rangea dans leurs fourreaux. Il était recouvert du fluide carmin mais n'en avait cure, préférant écouter les sons de la forêt qui relatait la chasse de sa meute lancée à la poursuite des fuyards.

    Puis il eut le silence.

    - C'est fini.

    Un hurlement d'Aran lui fit soudainement redresser la tête et son sourire cruel revint trancher son visage masqué par le sang.

    - Nous repartons en chasse, dit-il de sa voix rauque à ses hommes qui se sourirent d'un air entendu. La guerre ne jouait pas en leur faveur mais les méthodes d'embuscade du Chien de Guerre, quoique fourbes, avaient les mérites d'être couronnées de succès.

    Soudain un martèlement de sabots perturba le silence et un cavalier en armure arrêta sa monture à quelques pas.

    - Rappelez vos chiens, Chien de Guerre. Vous êtes demandés au camp.

    Le cavalier eut le mérite de ne pas même frémir sous le regard enflammé de colère que lui adressa le Chien de Guerre. Mais il était un soldat des Dragons Pourpres et se devait d'obéir. Son hurlement de rappel résonna donc dans la forêt et les chiens revinrent rapidement auprès de leur maître.

    Relevant la tête, il s'adressa au cavalier :

    - Quelle raison me fait mander ?

    - Vous avez de la visite.

    Le Chien de Guerre vit dans ses yeux qu'il se demandait qui pourrait bien avoir la folie de venir le voir. Il ne connaissait qu'une seule personne pour le faire depuis qu'il était devenu le Chien de Guerre.
    ****

    Elandael démonta de Massombre une fois au milieu du camp. Il avait été dur de le rejoindre, ou même de rentrer dans le royaume de Cormyr. La guerre dont il était victime ne rendait pas les routes très praticables. Mais ce n'était pas comme s'il était là pour un voyage d'agrément. Il avait dû laisser à Myth Drannor Illira avec leurs jeunes enfants et n'était pas même venu au nom de son père, le Général Ethial Helios. Juste venait-il prêter main forte à un ami de longue date.

    Même si le jeune demi-elfe plein d'entrain et d'amour pour la nature qu'il avait connu deux décennies plus tôt lors d'un voyage pacifique s'était-il mué en ce que les Dragons Pourpres appelaient avec respect et crainte le Chien de Guerre.

    Elandael sortit de ses pensées pour saluer le Chevalier de haut rang qui venait de le rejoindre.

    - Navré de vous recevoir sur le pied de guerre, sire. Je me présente : Tevonyel Alfar. Je dirige cette compagnie.

    - Enchanté, sire Tevonyel. Je suis Elandael Helios, mais sachez que je représente pas ma maison aujourd'hui, j'en ai bien peur. J'aurai aimé vous rencontrer dans de meilleurs conditions.

    Il se tourna d'un demi-cercle pour fixer la dizaine de cavalier fièrement dressé sur de lourds chevaux noirs comme la nuit.

    - Mon escorte et moi-même sommes à votre service tant que nous serons présents. Je sais qu'une cavalerie en forêt n'est guère aisée à manœuvrer mais je puis vous assurer que ces chevaux sont habiles entre les arbres.

    Il ne put empêcher un sourire fier d'ourler ses lèvres devant l'immobilité puissante de Massombre. Il n'avait sélectionné pour ce voyage que les meilleurs cavaliers et les meilleurs chevaux du haras phare des Helios. Son père avait émis cette condition pour accepter de le laisser partir.

    - Toute aide sera appréciable, sire. Mais, loin de moi l'idée de paraître indélicat, que faites-vous ici ?

    - Quelque chose d'assez simple. Je suis venu épauler un ami qui est comme un frère. Il s'agit de l'un de vos hommes, Cyrien fils de Daladin. Je crois que vous l'appelez le Chien de Guerre.

    Il ne sut vraiment que penser du mélange d'assombrissement et de respect qui se battit dans les yeux de Tevonyel.

    - Le Chien de Guerre est parti chasser. J'allais justement le faire rappeler.

    Le Chevalier fit un mouvement du bras et un cavalier partit à toute allure. De par sa promptitude, Elandael comprit que son arrivée avait juste retardé son départ. Tevonyel s'apprêtait déjà à aller faire chercher le Chien de Guerre et ne semblait pas vraiment heureux de ses actions. Il allait devoir parler à Cyrien.

    - Nous allons faire monter des tentes pour vous.

    - Ne vous donnez pas cette peine, Chevalier. Mes hommes dormiront avec leurs montures.

    - Si vous le dites, répondit Tevonyel après un moment d'hésitation, surpris de son refus. Elandael le salua et il repartit à ses devoirs. L'elfe fit demi-tour, claquant de la langue, et ses cavaliers sortirent de leur immobilisme pour se diriger vers un coin libre du camp pour démonter et s'occuper de leurs montures. Elandael les y suivit, Massombre le suivant docilement, guettant du coin de l'œil le retour de Cyrien.
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Il commençait à vraiment s'inquiéter pour son ami. De ce qu'il entendait, le Chien de Guerre était rempli de haine et de colère, toujours prompt à partir en chasse, ne laissant jamais un seul ennemi sans sortir vivant. Mais le Cormyr n'était pas en position de force dans cette guerre et il craignait fortement que cette habitude d'embuscades solitaires ne finissent par le faire se heurter à un ennemi trop conséquent.

    Ce fut le silence soudain qui lui fit relever la tête du boulet sur lequel il s'était penché, l'un des chevaux ayant une entaille un peu inquiétante. Il ordonna les soins nécessaires à son cavalier et s'avança de quelques pas avant de s'arrêter, voyant Tevonyel aller à la rencontre de Cyrien, la démarche raide témoignant de son énervement.

    Il en profita pour détailler de loin son ami. Ses lèvres pincées et ses yeux fuyants étaient coutumiers de son inclinaison à ne pas supporter les ordres. Mais le silence des chiens étaient plus inquiétants. Ils lui paraissaient éteints bien qu'encore féroces ; il comprit qu'ils ne se réveilleraient qu'à l'ordre de tuer et ses yeux se voilèrent. Même Aran fixait Tevonyel d'un air inquiétant, comme s'il était prêt à lui sauter dessus au moindre ordre de son maître. Maître actuellement couvert de sang et qui subissait les remontrances de son supérieur d'un air absent.

    Elandael ne sut ce qu'ils se dirent car il n'avait pas à entendre cette conversation et resta donc où il était. Une fois Tevonyel parti, Cyrien le rejoignit d'un pas de plus en plus rapide, un véritable sourire semblant se frayer difficilement un chemin sur son visage maculé.

    - Mon frère, dit-il d'une voix rauque, comme s'il n'avait plus l'habitude de parler. Elandael perdit son air sévère pour lui sourire avec douceur, essayant d'imiter Illira quand elle berçait leurs enfants, et ouvrit les bras pour recevoir son étreinte, conscient que nombre des yeux étaient fixés sur eux, avec incrédulité. Aran gambada autour de lui, lui faisait la fête avec joie, mais les autres chiens restaient éteints. Elandael en reconnut peu parmi eux.

    - Que fais-tu ici ? s'enquit Cyrien et il put sentir sa réelle surprise dans sa voix. Secouant la tête devant une telle bêtise énoncée aussi sincèrement, Elandael passa son bras autour des épaules de Cyrien.

    - Je ne pouvais pas te laisser seul dans cette épreuve.

    Cette fois-ci, le sourire véridique ne prit que quelques secondes à fleurir.
    ****

    Obtenir de Tevonyel de pouvoir repartir en chasse avait été difficile. Le Chevalier ne supportait plus ses excursions décidées selon lui sur un coup de tête. Mais il lui rapportait toujours des victoires alors Tevonyel ne faisait que le tempérer par la parole, ou du moins essayer. Lui ne pouvait pas sentir les fragrances insupportables des orcs sans réagir.

    Cette fois-ci pourtant, Cyrien était en mission ordonnée par le Chevalier. Depuis quelques jours, plusieurs de ses chiens disparaissaient sans raison et la meute retrouvait leurs corps lacérés. Cyrien sentait à chaque fois son cœur se serrer de douleur avant de se consumer de haine.

    Puis le Chien de Guerre avait hurlé à la vengeance.

    Tevonyel la lui avait accordé. Cyrien savait qu'il l'utilisait comme avant-garde pour l'attaque qui avait été décidé depuis peu. Il s'en moquait éperdument : le Chien de Guerre ne voulait que venger la mort des siens et prendre la vie du plus grand nombre d'ennemis.

    Il n'avait pas prévenu Elandael. Si la venue de son frère pour l'épauler avait réveillé son cœur mort par le feu de la haine, il ne voulait pas qu'il s'implique davantage dans cette guerre qui n'était pas la sienne. Quand ses pensées n'étaient pas emplies de rouge fureur, Cyrien songeait à la douce Illira qui perdrait son époux adoré et à leurs enfants qui lui étaient chers. Illidrin et Esnaëlle ne méritait pas de subir la perte d'un père.

    La meute ne faisait cette fois-ci aucun bruit. Le cœur de la chasse était froid et funeste. La vengeance les appelait mais Cyrien sentait que quelque chose n'allait pas. Le Chien de Guerre s'en fichait éperdument, tant que vengeance était obtenue.
    Il lui était difficile de garder l'esprit clair.

    Aran fut le premier à donner l'alerte. Ce chien était un fabuleux pisteur et il sut flairer le piège avant de tomber dedans. Mais les chiens qui le suivaient ne purent s'arrêter à temps et leurs cris moribonds alors que leurs flancs étaient lacérés par les piques camouflées avec science résonnèrent en écho à l'alerte d'Aran.

    Cyrien se stoppa en l'instant, sur le qui-vive, comprenant avec effroi qu'il avait mené sa chasse dans une embuscade minutieusement préparée pour eux. Ses hommes se dispersèrent par habitude dans les futaies mais furent aussitôt abattus par les gobelins qui s'y étaient cachés.

    Il aurait alors dû sonner la retraite. Mais le Chien de Guerre ne reculait jamais, même lorsque la prudence ou la survie l'exigeait ; il ne savait que se battre, tuer et se venger.

    Alors il poussa un hurlement de ralliement où la rage se mêlait et sauta droit vers les fourrés minés de pièges, sa meute à sa suite. Beaucoup des chiens y périrent, et les cris de terreur de ses hommes continuaient à hanter les buissons. Mais le Chien de Guerre continua sur sa lancée, indifférent à la peur et à la douleur.

    Il déboucha sur une clairière, ensanglanté et un bras rendu inutile par une pique jaillie des ombres, avec seulement Aran à ses côtés. Derrière eux, guerriers et bêtes continuaient d'hurler. Un orc immense se dressait au milieu de la clairière, un air victorieux sur le visage. Le Chien de Guerre jappa rauquement, dégoûté par la vue de ce sourire satisfait sur cette face noirâtre.

    - Tu vas mourir, promit-il en armant son bras valide. Aran gronda aussitôt. L'orc se mit alors à rire et écarta les bras, lui présentant son torse.

    - Viens donc, Chien de Guerre. La mort te tend les bras.

    Dans le même hurlement, le demi-elfe et son chien se jetèrent sur l'ennemi. L'orc attendit le dernier moment pour esquisser un pas de côté, attrapant la gueule baveuse du chien pour le balancer derrière lui, de l'autre bras parant par sa lance en forme de trident la dague qui visait son cou. Le Chien de Guerre utilisa aussitôt les ombres pour se téléporter dans le dos de l'orc, frappant à la nuque, mais il y fut encore arrêté par le talon métallique de la lance. Trop surpris par la rapidité de son ennemi, il ne put éviter la contre-attaque contre son ventre et s'écrasa violement sur le sol.

    Crachotant du sang, son armure s'imbibant rapidement au niveau du flanc, Cyrien essaya de se relever mais ses jambes eurent un moment de faiblesse et il retomba à genoux, regardant avec impuissance la lance vrombir vers sa tête. Il refusa de fermer les yeux et affronta la mort du regard.
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Mais elle se détourna de lui. Aran jaillit soudain et ses crocs se refermèrent fermement sur la hampe, la brisant sous la force de la puissante mâchoire. Le bois éclata un peu partout, éraflant le visage de Cyrien, perforant le museau et les babines du chien, et entaillant la main de l'orc qui jura violemment. Il balança un coup de pied dans le flanc exposé d'Aran qui roula en couinant jusqu'à son maître, se relevant sur le champ, bien que faible sur ses pattes, pour faire rempart de son corps.

    - Fuis, souffla Cyrien mais le chien ne bougea pas d'un poil, grondant en continu. Pour la première fois depuis longtemps, le Chien de Guerre avait peur. Il peinait à bouger, Aran n'en pouvait plus lui-aussi, et il n'attendait plus ni ses hommes ni ses autres chiens.

    - Fuis !

    Même le ton d'ordre n'eut aucune prise sur Aran qui ne cessait de grogner sur l'orc qui s'avançait à pas lents. La clairière fut soudainement remplie par d'autres orcs et des gobelins qui encadraient ce qui restait de son escouade. Il n'y avait nulle part traces de ses chiens.

    - Tuer jusqu'au dernier. Ce n'est pas ton adage, Chien ? ricana le chef orc. Un violent frisson de colère remonta dans sa gorge avec un goût de bile et de sang. Bandant ses muscles avec la force du désespoir, Cyrien se releva et fonça dans les ombres, déclenchant sa danse sanglante.

    L'orc dégaina son immense épée dès qu'il le vit bouger. La première attaque l'eut à l'épaule, il para la deuxième, ne put éviter la quatrième qui s'enfonça dans une faiblesse de l'armure, près du cœur, et repoussa le demi-elfe avant qu'il ne puisse dégager son arme pour une cinquième attaque, son autre bras pendant inutilement le long de son flanc.

    Aran prit alors la suite de l'assaut et ses crocs acérés labourèrent les bottes de l'orc, rompant aisément le cuir pour s'en prendre aux tendons. Avec un hurlement de douleur et de rage, l'orc asséna un coup puissant de son poing armé dans la tête du chien qui s'effondra en couinant.

    - Aran ! s'écria Cyrien en voulant aller à son secours. Mais une flèche vint se ficher dans sa jambe d'appui, le faisant une nouvelle fois manger le sol sous les quolibets des orcs et des gobelins et les gémissements de ses guerriers.

    Enragé, le chef orc aboya un ordre dans sa langue gutturale et un petit gobelin lui amena rapidement une lourde lance. Cyrien comprit ce qu'il allait en faire et voulut se relever, mais n'y parvint pas, d'autant plus que deux guerriers orcs venaient de rompre les rangs pour le maintenir au sol, tordant ses bras derrière son dos. Il eut beau gronder, jurer et se débattre, il ne put rien faire pour arrêter le chef orc qui repoussa violemment le gobelin et plongea sans hésiter la lance dans le cœur de son chien.

    Aran poussa un unique couinement en se tordant sous la soudaine douleur puis sa gueule expira son dernier souffle et le corps mou retomba sans vie, la lance toujours fichée en lui. Le chef orc l'y laissa et se tourna vers Cyrien.

    - Vois ta folie, Chien.

    Il récupéra l'une des dagues du demi-elfe qui gisait par terre et sourit méchamment. Sa voix féroce intimida aux deux guerriers orcs de le redresser et il se retrouva à pendre lamentablement, tenu par leurs poignes qui lui semblaient le broyer jusqu'aux os.

    - Avant que tu ne puisses plus jamais voir.

    Et il lui lacéra le visage de sa propre dague, tranchant l'œil dans le même mouvement, si promptement qu'il ne put s'y préparer, et lui arrachant sous la a douleur un hurlement qui déchira les airs.
    ****

    Il passait l'étrille en larges cercles sous le ventre de Massombre lorsqu'un raclement de gorge lui fit lever la tête de sa tâche. Tevonyel Alfar se tenait à quelques pas de là, des yeux admiratifs, et impressionnés, posés sur l'imposant étalon. Souriant fièrement, Elandael flatta le flanc puis l'encolure de sa monture et s'avança vers l'elfe des bois.

    - Que puis-je pour vous, sire Chevalier ?

    Tevonyel ramena son regard sur lui et il se figea devant l'inquiétude qu'il y lut.

    - J'ai envoyé le Chien de Guerre rechercher les responsables du massacre de ses chiens. C'était il y a une heure et vous êtes encore là. J'en conclus qu'il ne vous a pas demandé en renfort ?

    - Je ne suis même pas au courant que Cyrien est parti, maugréa Elandael, les épaules raides. Tevonyel recula d'un pas, embarrassé.

    - Je croyais que vous étiez proches.

    - Nous le sommes, affirma-t-il d'une voix sèche en faisant un vif demi-tour. Sauf que mon frère oublie souvent que me demander de l'aide n'est pas me déranger. Il doit croire qu'il ne faut pas que je m'implique davantage.

    Il marqua un temps d'arrêt devant la selle de Massombre et siffla entre ces dents, l'air sévère.

    - Quelle imbécillité.

    Massombre piaffa en réponse à son agacement, frappant le sol avec force. Comme il s'emparait du tapis et de la selle, Tevonyel lui demanda :

    - Auriez-vous besoin de renfort ?

    - Je crois que vous préparez une attaque.

    Il se retourna vivement, faisant sursauter son vis-à-vis par le regard furieux qu'il posa sur lui.

    - Et je crois également que le Chien de Guerre est autant une avant-garde qu'une diversion. Vous l'avez envoyé dans un piège.

    - Il y serait parti quand même, se défendit Tevonyel sans se départir de sa fierté, refusant d'assumer une quelconque culpabilité. Et je vous envoies à son secours. Faites vite.

    Il lui indiqua la direction que l'escouade de Cyrien avait pris et se retira sèchement, n'ayant certainement pas apprécié ses accusations. Elandael ne s'y arrêta pas : le temps pressait et plus il en perdrait, plus il y aurait de risque qu'il ne retrouve qu'un cadavre.
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Modifié (octobre 2016)
    Il finit de mettre selle et bride à Massombre et l'enfourcha d'un mouvement leste. Un regard rapide lui confirma que ses hommes étaient également prêts au départ. Les chevaux noirs piaffaient et secouaient la tête d'impatience, dansant entre les jambes de leurs cavaliers.

    - Cavaliers des Helios ! clama-t-il en se dressant sur sa selle. L'ennemi est devant et mon frère est parti à leur encontre. Soyons véloces et habiles ! Il nous faut faire vite.

    Ils claquèrent leurs étriers contre la boucle métallique de leurs sangles pour lui répondre puis les chevaux s'élancèrent comme une seule bête, s'engouffrant dans les fourrées. Alors que Massombre sautait puissamment au-dessus d'un tronc couché puis esquivait habilement un buisson entre deux arbres, Elandael se dit qu'il avait là une opportunité de vérifier si l'entraînement avait porté ses fruits.

    Ils allaient devoir faire encore mieux.

    Et ils le firent. Ces chevaux-là savaient reconnaître les accrocs dans l'humus de la forêt et les passages entre les taillis. Ils ne craignaient ni le sifflement de fuite des animaux qu'ils dérangeaient ni les trilles des oiseaux. Et ils sentaient l'urgence émaner de leurs cavaliers, ce qui les poussait à être encore plus habiles et rapides.
    Après une chevauchée assez longue pour tremper le poil épais des chevaux, Massombre qui galopait en tête pila soudainement, entraînant l'arrêt de ses comparses en un bel ensemble. Elandael ferma les yeux en baissant la tête devant les cadavres de chiens et d'elfes qui parsemaient les futaies et les taillis devant eux. Nombre de piques les perforaient de toute part.

    - Dispersion, ordonna-t-il. Les chevaux trouveront une ouverture. Encerclons l'ennemi. Mon signal donnera l'ordre de la charge.

    Ses cavaliers opinèrent et disparurent au petit trot entre les fourrés. Un léger talonnement remit Massombre au pas et l'imposant étalon piétina un instant sur place avant de décider d'une route ; les ennemis avaient piégé l'endroit avec science.

    Il apercevait la clairière qu'il s'attendait à trouver lorsqu'un hurlement perça le silence oppressant qui régnait jusqu'à présent. Elandael sentit son sang se glacer d'effroi en reconnaissant la voix de Cyrien.

    Il se força pourtant au calme et mena Massombre jusqu'à l'orée de la forêt. Ses cavaliers semblaient avoir réussi à encercler les orcs. Il entreperçait les éclats de leurs épées qu'ils utilisaient pour le prévenir.

    Au milieu de la clairière, un immense orc se dressait à côté du cadavre d'Aran, fiché au sol par une lance. Elandael siffla de colère, sachant d'avance à quel point cette mort allait dévaster son ami. S'il s'en sortait vivant. Il voyait l'orc lever la propre lame de Cyrien sur lui une deuxième fois.

    Sans attendre plus longtemps, Elandael poussa un son strident qui n'était pas s'en rappeler le cri de combat d'un étalon en rut. Massombre bondit en avant en poussant un saisissant écho et le tonnerre de ses sabots sur le sol finit de jeter la terreur dans les rangs ennemis qui ne s'attendaient pas à voir débouler dans de formidables hurlements une dizaine de cavaliers elfes montés sur d'immenses chevaux noirs.
    Le combat s'engagea aussitôt. Les orcs et les gobelins se défendaient avec acharnement ; vite leur avantage initial dû à la surprise céda sous le nombre et chaque cavalier se retrouva encerclé. Mais l'ennemi n'avait pas prévu s'attaquer à des chevaux de guerre qui répondaient à leurs cris par des hennissements terribles et à leurs attaques par des morsures et des ruades.

    Un son de cor lui apprit qu'un de ses cavaliers avait réussi à libérer les survivants de l'escouade de Cyrien. Il lança donc Massombre contre le chef orc qui s'arcbouta pour supporter la charge du cheval. Le choc fut si grand qu'Elandael crut être désarçonné. Il n'y croyait pas ses yeux : l'orc avait réussi à stopper Massombre en enserrant son poitrail de sa large poigne. Mais il s'affaissa soudain à terre, une cheville faiblissant, et ne put retenir l'étalon qui se libéra en cabrant vers l'arrière, rendu furieux par l'arrêt de sa charge.

    Trop affaibli par ses premières blessures, le chef orc ne put que lever la lance qu'il venait d'arracher du corps d'Aran vers le cheval qui abaissait ses terribles sabots sur lui. Elandael appuya fortement sur le flanc gauche de sa monture qui obéit malgré sa position et se décala de quelques millimètres. La lance déchira la sangle et Elandael resserra vivement les jambes pour éviter qu'elle ne chute et l'emmène à terre dans le mouvement.

    Sa dernière défense écartée, le chef orc n'eut plus rien pour le protéger et son crâne vola en épars morceaux d'os et de cervelle sous l'impact puissant des sabots qui résonna lugubrement dans la clairière. Les derniers orcs et gobelins restant s'enfuirent sans demander leur reste une fois leur chef mort et Elandael sonna la retraite, refusant de mettre la vie de ses cavaliers plus longtemps en danger.

    Il démonta dans l'instant, calmant Massombre d'une caresse sur le chanfrein pour qu'il arrête de piétiner le corps du chef orc, et se précipita vers Cyrien. A son grand soulagement, son ami respirait encore et était même conscient. La moitié de son visage était ensanglanté et l'entaille lui paraissait profonde ; il doutait qu'il retrouve la vue de cet œil-ci.

    - C'est fini, murmura-t-il. Cyrien ferma son œil valide en expirant faiblement, fragile et tremblant. Son bras intact resserrait les poils d'Aran vers lequel il avait rampé. Il n'y avait pas que son œil qui se trouvait mort en cette journée. La rage du Chien de Guerre venait d'être douchée.

    Elandael le prit délicatement dans ses bras, ordonnant à l'un de ses cavaliers de récupérer le corps d'Aran, et le fit monter sur la selle de Massombre, prenant garde à ce qu'elle ne glisse pas. Il fit le tour de sa monture pour rafistoler du mieux qu'il put la sangle et sauta souplement sur sa monture.

    - Mes hommes…, murmura Cyrien en essayant de tourner la tête. Elandael regarda pour lui ce qu'il en était. L'état général était mauvais. Il ne restait que cinq des dix chevaux initiaux et autant de cavaliers qui prirent chacun une personne en croupe.
    Alors il ne répondit rien à son frère qui comprit par son silence l'ampleur du désastre. Il ferma les yeux et se laissa vaincre par l'inconscience, la mâchoire serrée par la tristesse de son cœur broyé de culpabilité.

    Elandael ne pouvait maintenant qu'espérer qu'il s'en remette un jour.
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Gnoll avait du mal à suivre les amples foulées de Massombre et Cyrien sentait que son impuissance commençait à fortement agacer sa capricieuse monture. Le coursier tirait sur les rênes pour essayer de mordre la croupe noire qu'il s'échinait à dépasser. Cyrien se demanda s'il ne valait pas mieux relâcher la pression et laisser Gnoll prendre de la graine d'une ou deux ruades.

    Mais il vit les jambes d'Elandael appuyer légèrement vers l'arrière et Massombre ralentit son allure par quelques pas à reculons. Sa grosse tête restait pourtant un museau plus en avant, son encolure une paume plus haute et Gnoll renâcla de mauvaise humeur.

    - Tu as un talent particulier pour te dégoter les chevaux au pire caractère qui soit, commenta Elandael qui leva son pied botté pour écarter la tête de Gnoll qui s'avançait pour mordre Massombre. Cyrien ne voyait pas le visage de son ami qui se trouvait dans son angle mort et ne répondit rien, même s'il fit s'écarter Gnoll d'un mètre. Il savait que le calme affiché par Massombre était surfait et que la moindre morsure serait sévèrement punie.

    Son bandage poisseux le dérangeait. Ses points avaient encore dû sauter. Qu'importe, il préférait garder son œil ouvert, bien que mort. Elandael voulait qu'il aille voir un prêtre dès qu'il serait arrivé à Myth Drannor mais Cyrien comptait bien refuser. Comme il avait refusé l'offre de Tevonyel qui voulait l'envoyer auprès des mages des Dragons Pourpres. Cet œil perdu était le symbole de sa folie et un rappel constant que sa haine et sa vengeance étaient responsables de la mort de presque toute son escouade et de toute sa meute, y compris son cher Aran. Ce chien-là était avec lui depuis qu'il était gamin, il avait grandi avec et perdu un frère.

    Par la seule faute de son arrogance.

    - Arrête de gratter. Voilà pourquoi tes points s'enlèvent.

    Cette fois-ci, Cyrien fit l'effort de tourner la tête vers son ami et croiser son regard inquiet. Il haussa les épaules sans piper mot mais abaissa sa main dont les ongles étaient noirs de sang séché. Elandael soupira et lança Massombre au galop, l'obligeant à essayer de le suivre avec Gnoll. Les portes de Myth Drannor n'étaient plus très loin et ils les atteignirent rapidement. Les soldats en poste saluèrent son ami et posèrent sur lui des regards compatissants qui l'hérissèrent. Ils détournèrent rapidement le visage quand il les foudroya de son œil intact.

    - Tu ne disparais pas, lui ordonna Elandael après avoir démonté et renvoyé ses cavaliers se reposer. Cyrien tiqua : son frère le connaissait bien, il comptait effectivement s'éclipser discrètement pour aller se terrer quelque part en forêt.

    - Tes enfants n'ont pas à me voir dans cet état.

    - Illidrin et Esnaëlle savent que vous êtes revenu avec Elandael, les interrompit une voix forte et Cyrien baissa la tête pour ne pas croiser le regard du Général Ethial Helios. Il était responsable de la mort de cinq de ses meilleurs cavaliers et montures. Mais l'elfe âgé s'avança pour saluer son fils puis lui serrer l'épaule avec bienveillance.

    - Bienvenue, Cyrien. Vous êtes invité à vous reposer dans ma demeure.

    Par invité, il entendait bien qu'il y été obligé. Cyrien hocha la tête et le remercia du bout des lèvres. Ethial se tourna vers son fils.

    - Ta femme et tes enfants vous attendent tous les deux. Laissez les palefreniers s'occuper des chevaux et allez vite les rejoindre.

    Ils le saluèrent tous deux d'un mouvement de la tête et Cyrien emboîta le pas à Elandael vers la grande bâtisse qui se dressait au centre de paddocks, de pistes et de jardins. Un serviteur leur indiqua que la Dame Illira les entendait dans son jardin personnel, dans une cour centrale du bâtiment. Cyrien ne put s'empêcher de sourire. Ce jardin-ci était son préféré dans le domaine Helios. Illira le savait et ne l'avait certainement pas choisi au hasard. Par bien des égards, la femme de son frère lui rappelait sa mère, Te'arha. A son souvenir, son cœur se serra et il perdit son sourire ; il ne savait s'il aurait le courage de retourner la voir.

  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Modifié (octobre 2016)
    Ce fut des rires d'enfant qui les accueillit en premier lorsqu'ils pénétrèrent dans le jardin. Illira se leva en souriant dès qu'elle les vit et se dirigea d'un pas vif vers son époux qu'elle enserra dans ses bras.

    - Bon retour à vous, mon doux sire, lui murmura-t-elle au creux de son cou. Elandael rit et lui rendit son étreinte, le visage respirant de bonheur. Illira le relâcha et se tourna vers le demi-elfe en retrait.

    - Pourquoi restez-vous dans l'ombre, petit frère ?

    Il sursauta à l'appellation et elle s'avança vers lui pour lui prendre le visage dans les mains et déposer ses lèvres sur son front, lui renvoyant encore l'image de sa mère. Il se sentit tout d'un coup apaisé de sa douleur et de son tourment intérieur.

    - Cyyyriiii !

    Les criaillements enfantins lui percèrent les tympans mais son âme s'en délecta. Ils agirent comme un baume sur son cœur et il se détourna d'Illira avec un sourire sincère sur les lèvres. Deux petits elfes d'une dizaine d'années se précipitaient vers lui avec des visages radieux. Mais ils se figèrent tous les deux devant son visage mutilé et l'imposant bandage qui enserrait sa tête. Il était propre, changé un peu plus tôt, mais le sang devait commencer à l'imbiber.

    Si la petite fille resta à le regarder fixement, d'un air de plus en plus attristé, le petit garçon reprit sa course et fonça dans ses jambes, manquant de le faire tomber par la force de son étreinte. Seul l'un de ses petits bras était enroulé autour de lui, l'autre tenant serré un petit chiot au même pelage gris et à la même prestance que son regretté Aran.

    Cyrien s'abaissa à son niveau et le petit elfe resserra son bras libre autour de son cou, déposant un délicat bisou sur la partie de son visage qui était bandé.

    - Pour soigner, affirma-t-il avec une détermination sans faille. La petite fille sortit enfin de son immobilité et fondit sur eux. Elle s'engouffra entre son frère et lui pour le serrer avec plus de force qu'il ne l'en aurait cru capable.

    - Illidrin… Esnaëlle…

    L'émotion le submergea et avala les mots qu'il aurait pu leur adresser. Il enserra les deux enfants contre lui. Un instant plus tard, Illidrin se tortilla pour qu'il le lâche et se recula de quelques pas, lui présentant le chiot. Il avait les mêmes yeux bleus qu'Aran.

    - C'est Hir ! Le plus fort des petits d'Aran. Je m'en suis bien occupé.

    Le chiot gigota pour atteindre visage du demi-elfe et lui léchouiller le nez, sa queue battant follement l'air. Cyrien ne disait rien, le cœur serré en repensant à son défunt chien. Jusqu'à la vue du chiot, il ne se rappelait même plus qu'Aran avait laissé une progéniture à une forte chienne du Général Ethial Helios.

    - Je n'ai aucun doute que tu t'en es bien occupé, mon petit, dit-il en attrapant délicatement le chiot qui alla se lover directement dans son cou. Illidrin lui adressa un immense sourire qui rendit son visage rayonnant. Sur le côté, Esnaëlle lui tira sur la manche et il se tourna vers elle avec un sourcil levé.

    - Hir sent très bien pour un petit chien. Il retrouve trop facilement les boulettes que je cache. Même plus qu'Illi quand je cache ses livres.

    - C'est toi qui me prends mes livres ?! s'écria le petit garçon, véritablement surpris, déclenchant le rire amusé de sa sœur. Esnaëlle se détacha de Cyrien après un autre bisou sur sa joue et tapa le nez de son frère d'une petite pichenette.

    - C'toi l'chat !

    Et elle partit aussitôt en courant, riant et tournoyant sur elle-même.

    - Esna !

    Illidrin resserra ses bras autour du cou de Cyrien puis le lâcha et se lança à la suite de sa sœur, peinant à l'attraper. Un doux rire fit lever la tête au demi-elfe et il croisa le regard amusé d'Elandael qui tenait sa femme esclaffée par la taille.
    Il y avait du chemin mais il pouvait certainement se remettre de cette épreuve. De sa blessure mais également de sa haine et de sa colère. Le petit corps chaud du chien contre lui le confortait dans cette idée.

    Au repas du soir, il mangea sans qu'on l'y force et conversa sereinement. Une fois qu'Illira se fut levée pour emmener les enfants se coucher, Cyrien se tourna vers Elandael, le visage apaisé.

    - Dès que mon œil ira mieux, j'irai voir ma mère.

    Son frère fut d'abord surpris puis sourit doucement.

    - Dame Te'arha en sera heureuse.

    Cyrien acquiesça. Il retournerait à Cormyr et oserait croiser à nouveau le regard de sa mère. Et auprès d'elle, il renouerait avec la nature… et avec Silvanus, qu'il n'avait que trop délaissé durant la guerre. Peut-être que le dieu aurait une réponse à sa question.

    Quelle route suivre désormais que le Chien de Guerre n'était plus ?
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Illidrin- L'énorme chose noire



    La chose verte était humide et fraîche. Ce n'était pas vraiment désagréable, juste intriguant, encore quelque peu inédit pour sa jeune conscience. Le bambin s'amusa à trifouiller les brins sous ses mains potelées, pressant, tirant, expérimentant cette nouvelle chose qu'il avait à peine pu toucher auparavant. Il gazouillait de rire, agitant les bras dans tous les sens, quand il remarqua qu'une partie de la chose verte était sortie de la chose brune pour rester dans ses mains.

    - 'E'b ! gazouilla-t-il avec une pointe de fierté, agitant les brins qu'une brise imprévue emporta soudainement loin de ses doigts sous son regard étonné. Mais ce n'était pas grave : la chose verte s'étendait partout autour de lui, à ne plus en finir. Il s'était tellement éloigné de la maison qu'il n'en voyait même plus l'entrée. Il y avait la chose verte devant, derrière, à côté et à côté. Et elle était amusante, cette chose verte, fraîche, humide, douce, et chatouilleuse aussi, quand elle caressait sa peau nue. Il savait qu'elle s'appelait « Herbe » puisqu'il avait entendu Maman la nommer ainsi : « Ne reste pas dans l'herbe, Illidrin. Tu vas prendre froid, mon chéri ». C'est ce que Maman lui avait dit.

    Une remontrance. Maman ne voulait pas qu'il aille dans l'herbe. Et il ne voulait pas qu'elle soit inquiète en le trouvant assis au milieu de la chose verte fraîche et humide, même si elle était aussi douce et chatouilleuse. Mais il ne voulait pas rentrer à la maison. Il connaissait la maison, mais pas le dehors. Et la maison était loin, il ne voyait que de l'herbe, sauf devant lui, au loin, au bout de sa vision : là-bas, la chose verte laissait place à une chose marron, comme la chose brune, mais plus claire. Une couleur qu'il ne connaissait pas encore.

    Il aimait apprendre, découvrir ces choses qu'il ne connaissait pas encore, aller voir ce qu'il ne savait nommer. Et ce n'était plus de l'herbe, cette chose marron-mais-plus-claire. Maman allait être contente de savoir qu'il n'était pas dans l'herbe.

    Le bambin fredonna son contentement d'avoir pris une décision et se balança en avant pour poser ses mains sur la chose verte. L'herbe lui chatouilla les paumes et il rit d'un son clair et tintant, oubliant momentanément son début d'aventure. Quoiqu'en dise Maman, il aimait cheminer dans l'herbe, crapahuter dans cette étendue infinie de vert, main après main, genou après genou. Il arriva bientôt à la chose marron-mais-plus-claire et y posa aussitôt ses mains, sans y réfléchir, impatient de curiosité. L'aspect était différent de l'herbe, le toucher tout autant.

    Pas doux, pas frais. Mais encore une fois chatouilleux. Il rit et tapota la chose marron-mais-plus-claire… couinant l'instant suivant. Il avait mal aux yeux d'un coup. La chose marron-mais-plus-claire l'avait attaqué. C'était amusant, ces petits ronds brillant sous les rayons caressants du soleil, qui avait virevolté autour de lui. Mais maintenant, il avait mal, il était loin de la chaleur de la maison, il ne la voyait même plus.

    - 'A'an ! A'a ! E'a !

    Pour la première fois de sa petite existence, ni Maman, ni Papa, ou même Sœur-Esna ne répondirent à ses appels. Ses couinements se transformèrent bientôt en pleurs. Il se sentait seul, perdu, et il avait mal à cause de la méchante chose marron-mais-plus-claire. Il voulait rentrer à la maison, dans la chaleur et la compagnie, pour se lover dans le giron de Maman, le cou de Papa et jouer avec Sœur-Esna, même si elle l'embêtait tout le temps.

    Un reniflement sonore le fit sursauter, s'arrêtant de pleurer sous le coup de la surprise, même si des larmes s'accrochaient encore à ses cils. Il ne connaissait pas ce son. Ce n'était pas le ronflement bruyant des chiens de Cyri lorsqu'ils dormaient. C'était plus gros, plus bruyant, plus inconnu. Le bambin cligna des yeux et remarqua enfin l'énorme chose noire qui s'avançait vers lui, faisant trembler la chose marron-mais-plus-claire sous ses larges… pieds ? pattes ? Ce n'était ni comme ses pieds, ni comme les pattes des chiens. C'était rond, brillant, ça claquait et sonnait dur, tintant, comme de la pierre.

    Et la chose noire était vraiment une chose énorme. Elle avait une tête immense, un cou épais, des épaules puissantes, de larges pieds-pattes-machins et un corps qui rendit noir son monde en emplissant tout son champ de vision.
  • silivren7
    silivren7 Member Messages: 64 Utilisateur Arc
    Peut-être qu'il avait un peu peur.

    Juste un petit peu.

    Jusqu'à ce qu'elle baisse sa grosse tête vers lui, léchant doucement ses joues mouillées par ses larmes et irritées par les grains de la chose marron-mais-plus-claire. Les mèches de la chose noire lui chatouillèrent le visage et il rit, oubliant sa peur, ses pleurs et son ancienne douleur. C'était doux et réconfortant, plein de chaleur, même s'il avait maintenant de la bave sur sa peau. La chose noire s'ébroua en entendant son rire, un drôle de son sortant de sa gorge, pas comme les bruits des chiens, plus grave, plus mélodieux, comme un oiseau mais nettement moins tintant.

    Maintenant qu'il n'avait plus peur de regarder la chose noire, il reconnaissait qu'il savait ce qu'elle était, même s'il n'en avait jamais rencontré. Il l'avait vu dans un livre d'image que Papa lui avait montré. Parmi tous les animaux, il n'avait reconnu que le chien et l'oiseau mais il se souvenait de ce qu'était la chose noire. Parce qu'il avait adoré cet animal. Papa avait rit devant sa joie et lui avait énoncé plusieurs fois le nom de cette créature pour l'aider à le retenir.

    - 'E'al !

    Les deux oreilles de la chose noire, le « cheval », bougèrent drôlement d'avant en arrière et le bambin rit en tapant des mains. Il était amusant ce cheval. Mais il était vraiment énorme, il prenait toute la place, et lui ne voyait plus rien.

    - 'E'al ! dit-il d'une voix autoritaire. 'o'te !

    Comme il ne semblait pas comprendre qu'il voulait qu'il le porte, le bambin s'agrippa à l'immense nez du cheval, qu'il arrivait à peine à encercler de ses petits bras, gazouillant à la chaleur et à la douceur de ses poils.

    - 'E'al, 'o'te, répéta-t-il, se mettant à sautiller sur place, accroché au nez du cheval. 'O'te ! 'O'te ! 'O'te ! 'O'te !

    Les grands yeux bruns louchaient en sa direction, les oreilles s'agitaient toujours, puis soudain, il dut comprendre ce qu'il lui demandait de sa voix haute perchée et massacrant les mots car il leva doucement sa tête, attentif à ce qu'il ne le lâche pas. Le bambin s'agrippa de toutes ses forces au gros nez, s'aidant même de ses petites jambes pour avoir plus d'emprise, et se mit à rire alors qu'il s'envolait du sol et se retrouvait encore plus haut que lorsque Papa le portait à bout de bras. D'autant plus quand le cheval tourna la tête pour le poser sur son dos tellement large que ses pieds n'en descendaient même pas.

    De là où il se tenait désormais, il voyait tout. Il voyait la chose verte infinie qui s'étendait partout, sauf là où le cheval se tenait, dans un enclos de chose marron-mais-plus claire. Il voyait la maison chaleureuse et même d'autres bâtiments qu'il ne connaissait pas. Il y avait un où des têtes de chevaux sortaient. Et d'autres chevaux au loin, dans une immensité d'herbes. Et du dos du cheval, le sol était vraiment loin… la chose marron-mais-plus-claire ne pouvait plus lui faire mal à cette hauteur.

    - Na' ! lança-t-il vers le sol, tirant la langue. Le cheval se mit soudain à bouger, faisant trembler de sa puissance tout son corps long, gros et large. Le bambin poussa un petit cri surpris, s'agrippant d'instinct aux longues mèches noires. Mais le cheval faisait attention à ne pas marcher trop vite et il s'habitua vite à son rythme. Ses mèches le chatouillaient mais elles étaient douces et chaudes, et il avait sommeil, un peu, tout cela avait été une grande aventure.

    Etalé dans les mèches, entendant pulser le cœur du cheval, bercé par son pas, le bambin s'endormit sans même s'en rendre compte.

    Ce furent des appels de son nom qui le réveillèrent. Le cheval s'était arrêté, tourné en direction des bruits. Le bambin reconnaissait la voix de Papa, et un peu celle de Maman, plus loin. Le cheval poussa un formidable cri, long, puissant, et tellement beau qu'il en sourit, surtout en voyant Papa réagir à cet appel.

    - Désolé, Massombre. Je ne peux pas m'occuper de toi pour l'instant. Illidrin a disp…

    Il s'arrêta en pleine phrase, ses yeux étant enfin tombés sur lui, caché par l'immense tête, l'énorme cou et les mèches épaisses du cheval.

    - 'A'a ! cria-t-il en souriant et en agitant les mains pour qu'il le porte.

    - Tu étais là, marmonna Papa, rassuré, en l'attrapant sous les aisselles pour le descendre du dos du cheval. Comment tu es arrivé là, toi ?

    - 'E'al Ma'om 'o'te, gazouilla-t-il en attrapant les mèches dorées de Papa qu'il aimait vraiment beaucoup emmêler. Ou plutôt, il aimait les tresser, comme Maman le faisait avec ses cheveux et ceux de Sœur-Esna, mais Papa disait toujours qu'il les emmêlait et qu'il devait aimer cela, vu qu'il le faisait à chaque fois qu'il le pouvait.

    - Massombre t'a porté ? sourit Papa en caressant le nez de l'énorme cheval. Merci, mon ami, d'avoir pris soin de lui.

    Le cheval secoua sa grosse tête d'en haut en bas, tendant ensuite le cou pour attraper les mèches de Papa pour les mâchouiller. Le bambin les lui donna bien volontiers, c'était amusant la tête de Papa en les voyant faire, sans même essayer de les arrêter.

    - Illira ! cria-t-il vers la maison. Illidrin était ici, il va bien.

    Maman se dépêcha de courir vers eux, inquiète et agitée, et il s'en voulut aussitôt. Il était parti sur la chose marron-mais-plus-claire pour pas l'inquiéter de le trouver sur l'herbe. Il tenta de lui expliquer mais il alla trop vite, ses mots s'embrouillèrent, il lui manqua des lettres et des sons, et elle ne comprit pas. Mais son incompréhension ne l'empêcha pas de le serrer contre elle, l'enveloppant dans sa chaleur et sa douceur.

    - Ma'omb o'te, lui dit-il fièrement en pointant le cheval du doigt. Maman regarda Papa avec de grands yeux étonnés.

    - Il était sur Massombre ?

    - Il faut croire qu'Illidrin est un cavalier-né, sourit Papa avec un éclat joyeux et fier dans les yeux.

    - Il ne marche pas encore. Comment est-il monté ?

    - Massombre a dû l'aider.

    - Au moins n'est-il pas allé plus loin comme ça, avec Massombre pour veiller sur lui.

    Le cheval émit encore ce son de gorge, grave et trillant, et Maman rit enfin, caressant à son tour le nez du cheval. Le bambin tendit aussi la main car il savait que ce nez était chaud et doux, qu'il y avait des poils qui chatouillaient et le souffle du cheval qui réchauffait la main.

    - Et maintenant, dit Maman, un poing sur la hanche, le regardant avec une fausse colère. Je vais débarbouiller ce garnement trop curieux et nous allons goûter.

    - Rentrez vite, chère Dame, avant qu'Esnaëlle ne décide de tout manger.

    - Ou de faire une bêtise.

    Papa rit et se pencha pour les embrasser tous les deux.

    - Je vous rejoins plus tard. J'ai promis à Massombre de le monter.

    - Ma'om' o'te 'A'a ? s'étonna le bambin et Papa lui sourit en ébouriffant ses cheveux.

    - Un jour, tu feras plus qu'être porté par Massombre toi aussi.

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