L'histoire de votre personnage :

« Le malheur des uns donne de l’inspiration aux autres »

Telle est une de mes devises, et la raison de ma présence sur cette scène du crime. Une troupe de marchands brutalement agressée, c’était certes peu original, mais chacun – agresseur comme agressé – avait sa propre histoire, et leurs existences jusqu’à cet évènement tragique allaient inspirer une nouvelle histoire.
Je m’empresse donc d’observer chaque détail de la scène, de recueillir les témoignages des survivants. Car en plusieurs siècles de pratique, j’ai non seulement appris à regarder, mais aussi à écouter.

Beaucoup de mes confrères à la vie plus courte – notamment les humains – négligent trop souvent cet aspect de notre devoir, empressés de nourrir avidement leur inspiration pour imaginer les sempiternelles mêmes histoires. Mais la créativité, comme un bon breuvage, nécessitent avant tout une bonne matière première, que le temps vient ensuite sublimer.
Délier les langues permet de recueillir le précieux nectar, goutte après goutte, afin d’en faire offrande à Milil(1). Puis, telle une cascade chutant du haut plateau de Cœur des Merveilles(2), cet amas chaotique coule sous forme d’un liquide lumineux et cohérent, jusqu’aux Chanteurs inspirés qui pourront représenter la grande Histoire derrière ces petites histoires, aptes à inspirer les esprits et les cœurs.

Et je peux parler en connaissance de cause.

Car ma vie n’a pas toujours été ainsi. Durant mon enfance à Eauprofonde, je n’étais que le simple fils unique de deux commerçants sans ambition, et j’ai attendu ma centième année pour avoir le courage de sortir du quartier marchand.
Je n’étais alors qu’un couard affable, disons-le franchement, mais cette journée – Milil en soit loué – devait irrémédiablement changer l’elfe que j’étais. Seuls deux sentiments profonds peuvent ainsi changer une personne : un grand bonheur ou son opposé, une grande tragédie. Fort heureusement, la Cité des Splendeurs m’offrit le premier, par la rencontre de l’inestimable Dame Méliade. Sa geste, son verbe, son élocution et sa grâce en toute chose suscitaient l’admiration parmi son entourage, mais plus important, éveilla en moi un talent artistique que je ne me connaissais pas alors.

Il me plait à dire que je suis né ce jour-là, lors de mon centième anniversaire, et que cette rencontre avec Méliade à la voix magnifique fut en réalité celle de Milil. Car il ne s’agit pas ici d’une banale histoire d’amour où le cœur d’un jeune elfe découvre sa muse, mais celle d’un bouleversement radical, où la perception du monde change du tout au tout.
Je n’étais tout simplement plus le même, et Milil guida mes pas vers ses serviteurs et son divin enseignement. J’observais ma vie comme le lecteur d’une histoire en cours, et vouait mon existence à chanter la poésie. Je quittais Eauprofonde pour arpenter la Côté des Epées, nourrissant mon être de ses légendes anciennes et présentes.

Las ! Les premières décennies furent difficiles, car les histoires ne remplissent guère l’estomac. Mais par la grâce de Milil je survécus, et appris peu à peu à me débrouiller au contact de personnalités variées – autant d’histoires qui croisaient la mienne. Dans les terres sauvages je survivais tel un rôdeur, sur les routes je rusais tel un roublard, et brandissais parfois rapière et main gauche dans l’espoir de poursuivre mon histoire. Les villes et les campements étaient le théâtre de mes représentations, ignorées au départ, peu à peu appréciées au fur à mesure que mon art progressait, et que ma foi se renforçait.

Je vis ainsi depuis bien des décades, et porte désormais la cape pourpre brodée de dragons dorés(3). Récompense ultime de ma dévotion et de ma persévérance, ma douce voix attise l’imagination, le rêve, parfois même la grandeur, chez mon modeste auditoire.

Mes pas me dirigent aujourd’hui vers Neverwinter, que le destin semble – une fois encore – choisir comme place centrale d’une grande aventure. Cette attaque de marchands n’est peut-être qu’un signe, ou un avant-goût, de ce qui m’attend là-bas.
Observer et écouter, puis laisser décanter, et enfin chanter, voilà toute ma vie.


(1) Dieu de la poésie, du chant, de l’éloquence
(2) Plan de résidence de Milil
(3) Tenue caractéristique des Chanteurs inspirés de Milil

Merci beaucoup Regerem !
Pour un titre de Conteur, un barde m'a semble approprié

J'ai eu de la chance de profiter d'un manque de participants, les prochains concours seront sans doute bien plus actifs - car plus la bêta approche, plus le jeu va attirer les joueurs.

ici 2013,
juste une question:
est-ce qu'on peut toujours écrire notre histoire ici ?